Sepideh Rezania

Sepideh Rezania passe beaucoup de temps à réfléchir aux “grandes questions” de l’efficacité énergétique. Par exemple, comment rendre compte de ses avantages difficiles à mesurer, et donc souvent négligés ? Que faudra-t-il pour déclencher une transformation rapide du marché ? Et le terme même d’”efficacité énergétique” ne constitue-t-il pas un obstacle à l’action ?

Prenons l’exemple de l’évaluation des rénovations. Selon le propriétaire d’Unrooz Solutions, basé à Kelowna, en Colombie-Britannique, si une ONG ou une entreprise propose une rénovation énergétique à un propriétaire ou à un gestionnaire d’immeubles commerciaux, ce ne sont pas nécessairement les économies de coûts seules qui peuvent conclure l’affaire. Il pourrait s’agir d’une augmentation du taux d’occupation. “Lorsque vous resserrez votre enveloppe, vous améliorez le confort,” explique-t-elle. “Vous pouvez littéralement avoir des gens assis plus près des fenêtres parce que vous n’avez plus les pics de froid et de chaleur caractéristiques d’un mauvais vitrage.”

De la même manière, la mise à niveau d’un complexe de logements abordables et/ou supervisés améliorera non seulement la santé de ses résidents, mais aussi celle de la communauté environnante. “Lorsque vous améliorez le bâtiment, vous améliorez la valeur que les individus qui y vivent pourraient apporter à l’économie,” explique-t-elle. “Ils peuvent être plus disponibles pour la main-d’œuvre.”

De tels avantages sont notoirement difficiles à quantifier. Mais, selon Mme Rezania, nous devons y réfléchir si nous voulons vraiment généraliser l’efficacité énergétique – ou quel que soit le nom que nous lui donnons.

(Le terme “efficacité énergétique” évoque inconsciemment les économies et la conservation, suggère-t-elle, et le problème est que les gens ne considèrent pas automatiquement l’énergie comme la ressource disponible la plus propre : “L’expression évoque le sentiment de freiner la croissance économique et, par extension, la création d’emplois”).

Après avoir travaillé aux États-Unis pendant 19 ans dans la conception et la fabrication d’appareils de téléphonie cellulaire, Rezania a décidé que le secteur de l’efficacité énergétique correspondait mieux à ses valeurs. Elle a atterri à la Northwest Energy Efficiency Alliance, un organisme à but non lucratif basé à Portland (Oregon) et financé par les services publics de Washington, de l’Oregon, de l’Idaho et du Montana. Elle y a passé cinq ans à diriger des programmes de transformation du marché dans les secteurs commercial, industriel et agricole. Elle continue de travailler comme consultante pour les services publics et d’autres entreprises des États-Unis sous le nom d’Unrooz Solutions ; le nom est persan et signifie “ce jour-là”, c’est-à-dire celui que vous pouvez envisager.

Tout en développant son réseau professionnel au Canada, Rezania participe bénévolement à des projets visant à promouvoir l’action climatique, l’efficacité énergétique, l’équité et la justice, ses passions. Elle voit l’opportunité d’élargir la proposition de valeur des co-bénéfices de l’efficacité énergétique et, ce faisant, d’inscrire fermement l’efficacité dans le contexte d’un modèle économique circulaire, où ses bénéfices profitent à beaucoup plus de gens.

“Tout est tellement interconnecté. Il est vraiment important, dans le cadre de la formation de la prochaine génération, d’élargir les perspectives : ne pas se limiter à l’ingénierie, mais s’intéresser aux sciences humaines, à des choses comme l’anthropologie, qui montre comment les émotions humaines sont liées à l’environnement bâti. C’est un pitch pour plus de généralistes !”

“Je pense qu’il y a une opportunité d’amener cette prise de conscience, et de trouver comment nous pourrions formuler une coalition pour conduire cela. Cela dit, ce n’est pas une tâche facile. Elle n’existe pas. Et nos approches actuelles, très étroitement ciblées, ne le permettent pas nécessairement. Il doit y avoir un moyen de déterminer ce qui est gagnant-gagnant-gagnant.”

Si quelqu’un peut y parvenir, nous parions qu’elle le peut.